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HIGHWAY COMPANION

12 titres

L’ampleur du phénomène Tom Petty est difficile à mesurer de ce côté-ci de l’Atlantique. Aux Etats-Unis, l’homme est une star. Incontournable. Pour exemple, lors de ses dernières tournées estivales, les concerts de Petty ont été ouverts par les Black Crowes, en 2005, et, cette année, par les Allman Brothers... qui n’avaient pas ouvert pour qui que ce soit depuis environ 1971. Les tubes de Petty forment à eux seuls une partie substantielle de la bande-son des stations de rock dit classique. C’est là qu’interviennent ses potentiels contempteurs : ce côté consensuel, propret. De fait, s’il a été assimilé à ses débuts à la vague punk, Tom Petty n’a jamais rien eu d’un révolutionnaire. C’est dans une certaine tradition américaine que le natif de Gainesville, en Floride, s’inscrivait - celle de Dylan, du Band et des Byrds - et qu’il incarne aujourd’hui peut-être mieux que quiconque. Ou de la façon la plus archétypique. Père putatif, avec d’autres, de l’americana contemporaine. “Highway Companion” n’est jamais que son troisième disque en solo, mais l’immense majorité de ses classiques ont été commis en compagnie des Heartbreakers, backing band aussi réputé que le E Street Band de Springsteen. Agé de 56 ans, Tom Petty livre ici un disque habité par une certaine mélancolie, celle du temps qui ne cesse jamais de s’enfuir, et toujours plus rapidement. Sur certains titres, un ton un peu trop enjoué ne trompe personne : c’est dans ses instants les plus introspectifs, ou les plus délibérément désabusés, que Petty fait mouche et touche au cœur : “Square One”, “This Old Town”. Ou lorsqu’il réveille son talent pour donner vie à des personnages ballottés entre rêves trompés, innocence perdue et besoin de prendre la tangente pour conjurer tout ça : “Flirting With Time”, “Damaged By Love”, “Night Driver”. A cet égard, le titre de l’album retranscrit parfaitement son humeur : un compagnon de route, pour épauler les longs voyages nocturnes avec le macadam qui se déroule à l’infini sous la lumière des phares. Le disque n’est presque ainsi que mid-tempos qui filent les uns après les autres avec fluidité. L’instrumentation, très bien mis en relief par la production spacieuse, possède un charme soyeux : tapis de guitares acoustiques, motifs électriques ciselés par l’excellent Mike Campbell, piano électrique. Un classicisme pour le moins classieux. Le sens de la chanson (les bons accords en soutien de la bonne mélodie, tout bêtement), d’une certaine simplicité si évidente à l’écoute mais si difficile à saisir est un autre point fort de Petty, qui ne se dément pas ici. Sans atteindre toutefois les sommets de certaines œuvres passées, comme le premier album homonyme avec les Heartbreakers, “Damn The Torpedo”, “Full Moon River” ou “Wild Flowers”. Quelques chansons, sur ce disque, ronronnent peut-être en effet par trop. Et le visuel de l’album est assez discutable. Mais pour ses meilleurs moments et, comme on dit dans un autre domaine culturel, pour l’ensemble de son œuvre, l’homme méritait bien une distinction.

Source : Bertrand Bouard (R&F)

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